Présentation Écosophie
L’Ecosophie : Une conscience collective
Le paradoxe de l’homme moderne est qu’il se conçoit comme un être isolé, issu d’une nature mécanique et vivant dans un univers inerte. Il se pense au niveau le plus élevé de la chaine du vivant.
Après avoir traversé différents cycles dans son évolution (minéral, animal, végétal), l’homme a développé son intellect, sa pensée et sa capacité de créer (une société à son service). Animé et obnubilé par cette volonté continuelle de survivre, il est en quête d’un monde meilleur pour lui sans se préoccuper des conséquences qu’entrainent ses choix pour la planète Terre.
Pourtant, la mécanique quantique nous apprend à regarder le mouvement et l’interdépendance entre l’infiniment petit et l’infiniment grand. La relation entre l’homme et la Nature est identique à la relation entre le microcosme et le macrocosme. Nous sommes tous connectés à tout et la matière est un tissu relationnel, une étoffe cosmique et une toile de connexions.
Cependant, les fondations de ce monde sont instables comme un château construit sur le sable et l’homme arrive à un moment important de son évolution car il peut à la fois influer sur la vie (manipulation génétique ou autres…) ou détruire la planète…
Malgré les appels alarmistes de la communauté scientifique internationale au sujet du climat et de la probable extinction massive d’espèces sur notre planète, il ne peut se remettre en question et assiste comme spectateur à ce chaos soit par dénie, soit par fatalisme sans prendre véritablement conscience que l’espèce humaine est également concernée.
L’homme existe à travers le regard des autres et à travers ce qu’il possède. Il se définit par ce qu’il pense « être » et donc crée une séparation avec ce « qu’il n’est pas ». Il ne peut concevoir l’extérieur qu’à partir de lui. En conséquence, il s’est désolidarisé de la Nature avec laquelle il ne sent plus relié. Il possède une vision purement économique du monde dans lequel il vit et dans cette réalité, tout possède une valeur marchande.
Dans cette poursuite folle du progrès, il a perdu la conscience de soi, des autres, et de l’environnement dans lequel il vit. Il met à mal la planète parce qu’il s’imagine extérieur et indépendant de la biosphère.
Une humanité inconsciente est dans du réactionnel. Elle ne sait pas où et comment trouver la bonne et juste attitude.
Prétendre avoir perdu notre connexion à la nature à cause de la civilisation démontre tout simplement que nous avons perdu notre connexion à nous-mêmes.
La difficulté de s’éveiller ou de se réveiller est liée à la présence de différents obstacles intérieurs qui renforcent la résistance au changement, rendant très difficiles une transformation de nos comportements.
L’homme fait partie d’un tout mais en prendre conscience est le fruit d’un chemin.
Il ne devrait pas oublier les sentiments de son cœur qui lui permettraient de vivre en accord avec la Nature et ses lois fondamentales. .
En prenant conscience qu’intérieurement, il est le jouet de toutes sortes de mécanismes s’exprimant et se projetant extérieurement, créant ainsi sa réalité, il est en mesure de comprendre que l’empreinte se rejoue sur des niveaux plus collectifs tel que nous le dit le Lama Deny. « Ecologie extérieure sans écologie intérieure n’est qu’illusion ».
Par conséquent, un fonctionnement centré sur soi et sur l’ « avoir » le mène à reproduire les mêmes schémas dans son environnement externe et dans la société, d’où la nécessité du travail intérieur pour qu’il puisse agir pour son environnement. L’action en soi et sur le monde sont indissociables.
Pour qualifier cette sensibilité qui vise une reconnexion avec la Terre-Mère, on parle d’Ecosophie.
Cette démarche, inspirée par une sagesse commune, est l’interaction existant entre chaque personne, la communauté dans laquelle et grâce à laquelle elle existe et le lieu où cette personne et cette communauté s’épanouissent.
Au lieu de voir la nature comme extérieure à nous, comme un réservoir de ressources, il serait nécessaire de l’envisager comme un processus de vie dans lequel nous avons un rôle à jouer et où notre responsabilité est engagée.
Cependant, la conscience humaine est basée sur la division alors que « comprendre », c’est prendre ensemble (cum-prehendere) tous les éléments composant l’objet que l’on entend analyser. On n’est plus, dès lors dans la division mais bien dans une dimension « holistique » : Vision multilatérale qui est on ne peut plus pertinente pour appréhender l’aspect complexe du réel. Ce n’est pas la facette économique, politique, naturelle ou sociale qui est en jeu, mais bien leur constante et dynamique interaction.
L’écologie actuelle, plus particulièrement en France, reste exclusivement dans une posture classique et progressiste et s’est enfermée au fil du temps dans une idéologie visant à transformer le monde, à se projeter dans un monde meilleur pour l’homme sans prendre en compte, et c’est l’essentiel, l’ordre des choses, l’évolution de la planète en interconnexion avec celle de l’humanité. Elle s’occupe des effets et non des causes.
L’écologie reste ainsi dans la droite ligne du productivisme de la modernité alors que l’écosophie réhabilite une réflexion plus traditionnelle, plus enracinée, plus en phase avec une nouvelle manière de vivre, un art de vivre, une éthique responsable individuelle et communautaire.
L’écosophie, exprime une forme de sagesse (sophia) de la maison, « Oikos » le lieu d’une grande famille élargie, d’un « domaine » et d’une communauté et non pas comme dominant la nature. Ce lieu fait lien et l’homme se ressent comme participant et coopérant.
L’homme est comme un instrument de musique d’un orchestre symphonique qui doit vibrer dans la même tonalité que l’ensemble pour que la musique soit harmonieuse. Chaque instrument à sa propre partition mais il contribue à en ensemble plus vaste que lui.
Chacun est indispensable à la solide harmonie de l’ensemble. Dans une cosmogénèse en perpétuel devenir, l’homme n’est plus un élément extérieur, élément dominateur, mais par la force des choses, il est solidaire de ce qui se passe en amont de ses champs.
Il est partie intégrante d’un tout le dépassant et l’intégrant. Il s’agit d’un « retour au réel » car la vocation naturelle de l’homme est de retrouver la Source, Sagesse immémoriale sachant reconnaître et vivre secrètement l’extraordinaire prodigalité de la nature-mère.
La démarche écosophique n’est en aucun cas un retour nostalgique sur le passé mais une reconnexion à un Réel plus élargi car la Sagesse des anciens nous parle de vérités universelles touchant la condition humaine.
Elle nous offre une occasion unique de recevoir les conseils de nos illustres ancêtres et de prendre conscience que nous pouvons, nous aussi, aspirer à la grandeur qui fera de nous des êtres prêts pour affronter les grands changements qui vont s’imposer à nous.
S’accorder au monde, respecter la nature, aimer cette terre, est une manière de s’approcher du Réel en son étonnante et prodigieuse fécondité.
Cette sensibilité Ecosophique pourrait exprimer ce que les traditions anciennes appellent la sagesse, Sophia, qui révèle une forme d’empathie et de responsabilité vis-à-vis de notre Terre dans tous ses aspects.
C’est une manière sage ou un art de vivre cohérent qui nous apprend à être attentifs du lieu de nous-mêmes d’où sont issus nos choix, nos gestes, nos perceptions, nos priorités et nos valeurs.
En introduisant de la conscience dans toutes nos dimensions intérieures, nous serons à même de poser des actes responsables et lucides sur notre région, notre nature locale, sur cette maison terrestre que nous appelons la Terre.
C’est dans cette approche du réel, que l’Ecosophie et la contemplation vont être très importantes et essentielles car elles nous apprennent à découvrir qu’au cœur de cet univers, quelque chose n’appartient pas à l’ordre du temps.
Prendre soin de la Terre, de l’univers n’a pas pour objectif de les faire durer plus longtemps mais de découvrir de l’éternel dans le temps et d’être libre à l’égard des éléments qui nous constituent. La beauté redonne de la joie et de la vie aux choses en reconnaissant la fabuleuse profusion de la nature-mère.
A ce propos, Pierre Rabhi nous dit : « Seule la beauté est capable de changer le monde en recréant du lien entre les êtres humains ». Beauté basée sur nos différences de cultures, de terrains, de terroirs. Respecter ces empreintes variées demande d’être dans une attitude de partage et de communion. L’unité abolit la différence et devient une résonance qui uniformise tout.
C’est dans cette approche que nous travaillons au sein de l’Association « Les Voies de la Connaissance » à travers l’école de Sagesse et ses agoras.
L’Ecosophie peut contribuer à la transformation nécessaire à notre évolution : Aimer notre planète et la protéger, sans séparation mais en reconnaissant notre appartenance à un monde en unité qui nous mène vers cette conscience collective plus grande.
C’est seulement par l’Amour, la plus grande source de pouvoir et de guérison, qu’il sera permis de réaliser cette mutation. C’est pourquoi nous parlons d’Ecosophie Agapé car sans le pouvoir de l’Amour, la réalité se modifie mais ne peut être transcendée.
Il ne s’agit pas d’une voie exclusive mais elle constitue une voie complémentaire pour une plus grande prise de conscience de qui nous sommes.
Nous cheminons à travers le partage dans des Agoras ouvertes à tous, basées sur des jeux de miroirs et questionnements lucides mais sans jugements dualistes de nos états intérieurs et ressentis extérieurs afin non seulement de réintroduire du respect vis-à-vis de la Terre, de la nature, mais aussi d’impacter différemment la trame de nos vies individuelles et collectives. Nous y ajoutons toujours des ateliers pratiques au cœur de la Camargue.
Ainsi l’Agora est pour nous, un espace de partage entre citoyens permettant la confrontation de notre « paradis intérieur » avec celui de notre entourage afin de développer un nouvel art de vivre conciliant avec toutes formes de vie, bonheur individuel et bonheur collectif.
L’Agora devient ainsi un lieu, où les savoirs traditionnels peuvent être utilisés de manière plus intense afin d’améliorer la qualité de nos choix.
Elle favorise la réceptivité à se sentir interpellé, concerné et responsable pour coopérer ensemble pour trouver les solutions les plus naturelles et les plus adéquates, dans un équilibre matière-esprit, face aux problèmes environnementaux actuels, que ce soit localement dans notre région camarguaise ou dans un contexte plus large.
Ce projet n’a pas de caractère politique, partisan ou militant ; il s’intègre simplement dans l’évolution holistique de notre humanité. Il contribue à sortir les personnes de leur isolement afin qu’elles commencent à s’ouvrir et à se préoccuper de leur sort mutuel.
Cette coparticipation permet de découvrir ce que signifie être responsable et être respectueux de notre humanité pour l’aider à s’élever. Ensemble nous pouvons devenir plus lucides et plus efficaces dans nos actions et nos décisions.
Nous favorisons cette voie d’intériorisation qui consiste à harmonier en permanence l’évolution du monde du « dedans » avec celle du monde du « dehors ». La Terre Gaïa, n’est plus un simple concept.
Dans notre cadre, ici en Camargue, nous tentons d’apprendre, à travers la connaissance de nos climats intérieurs une nouvelle façon de penser, une nouvelle façon d’agir, une nouvelle manière de vivre, une nouvelle conscience écologique, une nouvelle pratique de la pensée autant qu’une nouvelle manière d’agir éclairée par l’Amour.